[Quête - Aerdris/Lynn] Barrage poissonneux.

Nous sommes alors à la fin de l’été. On pouvait sentir que l’automne arrivait. Les températures atteignaient les 15 à 20 degrés pour ce jour. Ce qui était très très très froid pour quelqu’un qui venait de Ravey. L’ancienne capitale se reconstruisait à une vitesse des plus grandes. Tout le monde se préparait à l’arrivée de l’hiver et tout le monde péchait de plus en plus. La technique souvent utilisée était de créer des barrages de pierre afin de coincer les poissons et d’en capturer le plus possible là où on avait pied. Une technique rudimentaire mais efficace. Surtout quand les bateaux se font rares et prisés. Et de préférence utilisés pour la pêche au loin sur plusieurs jours. L’agriculture ne serait efficace qu’au bout d’une année, au prochain été, seule la pèche était rentable toute l’année pour l’instant. Il fallait donc prioriser cet élément de récolte de ressources.

Lynn passait donc faire un tour d’inspection au niveau de ces barrages, pour voir comment ça allait. Toujours aussi appréciée, son inspection se passait sans aucun problème particulier jusqu’à ce qu’on lui rapporte que depuis deux trois nuits, le barrage se trouvait tout le temps ouvert. Alors qu’ils le rebouchaient chaque nuit. Un crabe géant ? Une palourde ? Le Kraken, le mystère restait entier.

Les hommes chargés de mission de pèche ne savaient plus trop comment s’y prendre. Lynn décida donc de se charger du problème, rendre service au peuple ne pouvait jamais vraiment faire de mal.

Acceptant alors d’aider, elle ne voulait pas accomplir cela toute seule, on ne savait jamais vraiment comment cela pouvait tourner. On lui avait dit que le coupable se trouvait parmi les pécheurs, elle ne pouvait donc pas demander de l’aide à quelqu’un qui se trouvait parmi eux, ils se feraient prendre beaucoup trop facilement.
Elle alla alors à une taverne en reconstruction dans Dissiri, on pouvait toujours trouver des personnes motivées dans le campement. Et encore plus dans une taverne.

Malheureusement, personne ne se trouvait dedans pour une fois, chose rare. Personne n’était là, si ce n’est un homme aux cheveux argentés et aux traits fins. Lynn ne ressentait rien en le voyant, il dégageait comme une aura de…neutralité. Oui, neutralité était le mot. Une arme se trouvait sur lui, c’était donc un soldat, ou du moins quelqu’un d’expérimenté. Peu de gens se baladaient avec une arme de nos jours, lui faire confiance était douteux dans la mesure où il était difficile en ces bas mondes de croire en qui que ce soit, mais Lynn voulait toujours donner une chance à chacun.

Quoi qu’il en soit, elle alla quérir son aide de la manière la plus simple du monde, en demandant d’une manière polie et gentille.

« Excusez-moi Monsieur, je me présente, Lynn Nèss Deidre, je suis la dirigeante de ce camps de survivants. J’aurai besoin de votre aide, auriez-vous la gentillesse de me rendre un grand service ? »

Elle afficha alors son plus beau sourire, attendant une réponse de l'étranger, de préférence positive.

Assis, seul, dans une taverne de Ravey, Aerdris était complètement lasse, il avait parcouru un certain nombre de kilomètre en ce jour et ses jambes commençaient à lui peser. Heureusement pour l’impérial, il faisait relativement doux à cette période et le soldat pouvait supporter le temps, pourtant même avec ce temps il ne sentait pas au mieux de sa forme, il se sentait moite et désagréablement scruté par les habitants du cru.

Au final ses pas l’avaient mené au lieu le plus traditionnel du voyageur, la taverne du coin. Le bâtiment n’était guère attrayant et ne comptait en tout que deux clients. Dont l’un qui cuvait allongé dans un coin, invisible depuis l’entrée. De toute manière rien chez lui n’était intéressant, il était clair que l’individu n’avait plus rien, ses vêtements n’étaient que des loques, et seule son odeur trahissait sa présence.

Le serpent blanc gagna une place au plein centre de la pièce, et fit signe au tavernier qui ne daigna même pas répondre à son client. Le dernier client, quant à lui, se leva après quelques secondes, et plusieurs regards noirs. Il gagna lentement la place de l’impérial qui scruta avec haine, puis quitta la taverne non sans cracher aux pieds du voyageur éreinté.

Un rire quitta fugacement les lèvres d’Aerdris qui se leva sans un regard pour l’idiot qui quittait brusquement la taverne, puis se dirigea vers le comptoir.

« Il est évident que ces terres débordent d’amour, cher ami. » L’impérial renforça volontairement la prononciation du dernier mot ce qui fit tiquer le tavernier. Toutefois l’imposant gaillard garda le silence lorsque plusieurs pièces terminèrent leur course sur son comptoir. « Un simple verre d’eau fera l’affaire. Gardez la monnaie, nous dirons que c’est pour la qualité du service. »

Le citoyen du désert sourit à pleines dents et empocha les pièces sans mot dire. Le verre fut servi avec nettement de rapidité. Toutefois il le fut, aussi Aerdris regagna-t-il sa place, délaissant son désir d’engager une discussion avec le sombre personnage. Le silence se fit pesant, et l’impérial réfléchit plusieurs fois à quitter l’endroit, seulement il n’avait pas beaucoup d’espoir quant aux autres emplacements de la contrée, et puis l’argent n’était pour le moment pas un problème.

Alors qu’il hésitait à se payer une chambre pour se reposer, la porte de la taverne se rouvrit. Aerdris s’attendait presque à voir revenir le cracheur avec des amis, mais tel ne fut pas le cas. Au lieu de ça, une très belle femme entra, sa longue chevelure rouge capta alors immédiatement le regard non habitué de l’impérial. C’était la première fois qu’il découvrait cette couleur de chevelure, mais ce n’était pas pour lui déplaire.

Non, mais autre chose si. Une stature noble rayonnait à travers tous les gestes de la femme, ce qui coupa tout désir chez le serpent blanc. Une grimace vint prendre la place de son habituel sourire, et l’homme détourna le regard de la nouvelle arrivante. Toutefois cette dernière semblait avoir une idée toute différente de la suite, aussi gagna-t-elle la position du voyageur ashenvans qui ne se rendit compte de la chose qu’une fois qu’elle prit la parole.

« Excusez-moi Monsieur, je me présente, Lynn Nèss Deidre, je suis la dirigeante de ce camps de survivants. J’aurai besoin de votre aide, auriez-vous la gentillesse de me rendre un grand service ? »

Dirigeante du camp de survivants. Evidemment pensa très fort le soldat, la noble devait avoir usé de sa haute naissance pour prendre le pouvoir. Qui était réellement derrière cette place ? Un père proche du roi ? Les gens s’étaient encore une fois laissé embrigader par ces histoires de représentants des Dieux, ou par simple habitude de soumission.

Toutefois, et même s’il haïssait la noblesse, Aerdris ne laissa nullement son mépris prendre le dessus. Effaçant la grimace qu’il arborait, l’impérial se remit à sourire et se posa son regard droit dans celui de son interlocutrice.

« Enchanté, Lynn Nèss Deidre. Pour ma part je ne suis que le modeste mercenaire Aerdris Daedran. Ma lame, et moi-même, aurions tout le plaisir du monde à vous rendre service. » Léger silence. « Moyennant service rendu en retour, bien évidemment. »

Aerdris ne refusait jamais une offre de travail, de quiconque, tant qu’elle était acceptable. Il n’était pas assez riche, ni assez idiot pour ignorer tout travail rémunéré, mais il était tout aussi évident que le client devait proposer une récompense largement suffisante pour qu’un accord puisse être passé, et une noble doublée d’une dirigeante devait posséder assez pour devenir intéressante.

« Que puis-je donc pour vous ? »

« Enchanté, Lynn Nèss Deidre. Pour ma part je ne suis que le modeste mercenaire Aerdris Daedran. Ma lame, et moi-même, aurions tout le plaisir du monde à vous rendre service. »

Voilà une personne qui était bien aimable, cela faisait toujours plaisir de rencontrer des personnes agréables et volontaires. Une ressource qui était rare en ces lieux et en ces temps pour le moins troublés. Lynn s’apprêtait à lui expliquer le contexte quand l’homme aux cheveux argentés la prit de court dans son élan.

« Moyennant service rendu en retour, bien évidemment. »

Evidemment, la question de l’argent. Lynn préférait toujours garder cette problématique pour la fin. C’était de cette manière que l’on gardait et tenait en haleine quelqu’un qui attendait justement que l’on aborde la question de la récompense. Bien évidemment, la future souveraine anticipe toujours cette éventualité. Il est très rare de demander quelque chose à un inconnu sans rien offrir quelque chose en échange. La dure et réelle loi des mercenaires qui suivent le drapeau de l’or. Si elle était mercenaire elle ferait pareil.

Elle répondit alors à l’homme sur le même ton que lui.

« Bien évidemment. Vous aurez votre récompense en or une fois le travail accompli. Voici une avance. »

Elle déposa alors un sac contenant une légère poignée d’écus en or. En guise d’avance. Elle ne fit aucun commentaire dessus. Puis, la jeune femme commença à parler légèrement moins fort pour éviter que d’éventuelles oreilles qui passaient par ici ou bien par-là entendent ce qu’elle pouvait raconter.

« Nous faisons un barrage en pierre pour attraper les poissons, une méthode comme une autre. Cependant il est détruit à un certain point chaque nuit peu importe le nombre de fois que nous le réparons. Je demande votre aide car vous ne semblez pas venir d’ici, donc moins de soupçons seront présentés quand nous serons vus ensemble. Je vous donne rendez-vous devant le barrage à la tombée de la nuit. Une fois le coupable attrapé, vous recevrez automatiquement votre récompense juste après. »

Enfin, sans rajouter mot. La jeune femme tourna les talons et entama sa marche pour sortir du bar. Elle n’avait pas de temps à perdre, non pas que la présence de cet homme lui était désagréable, mais la reconstruction prenait du temps et il y avait bien d’autres affaires dont elle devait s’occuper. Comme un certain convoi qui se faisait tout le temps attaquer ou encore le parcours de deux frères jumeaux maîtrisant deux magies opposées…

C’est avec le sourire qu’elle regarda l’homme qu’elle avait employé.

« A ce soir alors Monsieur Daedran, j’espère pouvoir compter sur votre aide. Je vous promets que vous ne regretterez pas de m’avoir aidé. Tant sur le plan financier que pour vos affaires. Si nous réussissons, je répandrai qui plus est votre nom en tant que mercenaire de talent. »

La discussion avec la noble ne dura guère de temps, et la négociation fut particulièrement aisée étant donné que la femme donna immédiatement son accord à une récompense. La dénommée Lynn semblait extrêmement pressée et cela arrangeait Aerdris, cela pouvait signifier une mission courte. Aussi l'impérial ne discuta pas plus avant et laissa la noble quitter la taverne sans mot dire.

Le rendez vous n'était pas dans une temps tr_s long, aussi le serpent blanc ne s'accorda-t-il qu'une courte sieste suivit d'une courte remise en forme avant de rejoindre le lieu indiqué. Finalement la curiosité avait pris le dessus sur le rejet de la noblesse, et Aerdris avait hâte de connaître le fin mot de l'histoire.

Il ne fallut guère de recherches, ou de trajet pour parvenir, à l'heure, au barrage en question. L'édifice n'était pas très impressionnant, ni même fortement gardé, chose surprenante pour quelque chose d'aussi important. Peut être cela était une stratégie pour capturer le saboteur afin d'éviter qu'il prenne la fuite et ne s'en prenne à une autre structure, ou que la dirigeante n'était pas aussi puissante qu'elle pouvait se croire.

L'impérial se posta en hauteur, sur une dune de sable se trouvant tout près du barrage, il chercha alors du regard la noble qu'il devait retrouver. Il ne fallut pas longtemps à Aerdris pour trouver la femme, elle transpirait la noblesse, et était dotée d'une beauté non négligeable, qui la rendait totalement unique même au sein de son propre peuple. L'impérial se laissa quelques secondes pour observer plus avant son employeuse, mais aucunes informations d'importances ne furent dévoilées, elle se trouvait seule et l'attendait.

Cessant de scruter, avec un léger regret, la noble, Aerdris gagna le point de rendez vous. Apparaissant en toute discrétion derrière Lynn, le soldat s'assit en tailleur et interpella son employeuse.

"Ainsi il existe des ... hum, traitres, qui rejettent vos droits à diriger cette contrée." Le soldat à la chevelure d'argent avait un large sourire, et les yeux plissés, comme à son habitude, impossible ainsi de juger si la dirigeante avait été surprise ou non de l'intervention. "N'y a-t-il personne dans les ouvriers ou pécheurs qui eut remis en question votre, comment dirions nous ?" Léger silence volontairement prolongé. "Prise de pouvoir ?"

Aerdris cherchait à jauger la réaction de la noble, juger ainsi sa volonté et son désir de gouverner. L'impérial était véritablement intrigué par cela, il aimait énormément connaître les rêves de tout à chacun, et particulièrement de ceux capables de bâtir leur propre royaume. Et puis cette femme ne laissait pas l'homme de marbre inutile de se mentir. Toutefois, il y avait autre chose, quelque chose de bien plus important que tout le reste. Était-elle capable de mener à bien le rêve d'Aerdris, était-elle la leader recherchée ?

Tout cela, bien plus que la récompense promise avait motivé le mercenaire, et il était bien décidé à avoir les réponses à ses questions.

Le reste de l’après-midi se déroula assez vite. Lynn était partie s’occuper d’autres affaires. Notamment sur les autres moyens de nourrir la population. Quoi qu’il en soit, quand vint le soir, les pécheurs qui travaillaient près de la baie pour construire le barrage partirent de leur lieu de travail pour aller dîner. Laissant le lieu sans personne. En effet, nous étions à quelques semaines de l’apocalypse du dragon et on ne pouvait pas se permettre de mettre des gardes partout. La nation tentait de se reconstruire du mieux qu’elle pouvait et les gens étaient très épuisés et surtout déprimés après une telle catastrophe.

La jeune femme attendit donc cachée derrière quelques rochers, en hauteur, attendant le mercenaire qu’elle venait de recruter. Son attente ne fut pas longue, l’homme aux cheveux gris arriva peu après et ils commencèrent tous les deux à attendre. Lynn n’avait pas prononcé un seul mot depuis le début, se concentrant pour voir qui pouvait saboter le barrage encore et encore.

Mais le gentleman vint alors à la déranger pendant qu’elle observait la scène vide. Lui demandant si quelqu’un pouvait en vouloir à sa prise de pouvoir, si des traîtres pouvaient exister. Esquissant un léger sourire, Lynn ne s’était jamais posé la question. Cela était vrai qu’il pouvait y avoir de la concurrence, mais cette idée de devenir Reine était inculquée dans pas mal d’esprits surtout depuis une dizaine d’années quand elle commença la révolution. Or là il n’y a plus d’états, plus vraiment grand-chose. Si l’on tue une population elle peut se reconstruire, mais si l’on détruit sa culture, son savoir, c’est ainsi que l’on pouvait vraiment l’annihiler, or ce n’était pas le cas présent. Les gens n’avaient pas encore oubliés, c’est pour ça qu’il fallait reconstruire le Royaume au plus vite, pour préserver l’unité nationale.

Aussi, Lynn répondit d’une manière très simple au mercenaire.

- Voilà une question bien singulière sieur Mercenaire. Pour vous répondre, un pouvoir ne se transmet pas. Il se mérite. Si aujourd’hui je veux prendre le pouvoir, c’est parce que j’ai l’ambition de faire quelque chose de bien pour aider mon entourage. Si jamais on n’approuve pas ma prise de décision, qu’il en soit ainsi. Mais je me battrai jusqu’au bout pour préserver ce qu’il reste de Ravey et pourquoi pas étendre notre territoire. Etant donné que le monde n’est reparti de rien, c’est l’occasion idéale pour s’étendre, rassembler tout le monde sous la même bannière sans faire couler le sang et surtout préserver et protéger un maximum de personnes.

Elle prit le temps de souffler. Ses paroles venaient droit du cœur, elle n’avait pas vraiment réfléchi à sa réponse, peut-être que cela aurait des conséquences sur l’avenir, qui sait. Mais ce n’était pas le moment de tergiverser.

- Enfin, je serai ravie de discuter avec vous après cette mission terminée. Dissimulez-vous, quelqu’un approche.

En effet, des pas se firent entendre et des silhouettes approchèrent. Se préparant à intercepter les individus. La magicienne se retint quand elle vit qui approchait du barrage. Les silhouettes en question étaient bien petites. Plus ils se rapprochèrent, plus ils devenaient indentifiables. Cela ressemblait à des enfants, oui, des enfants, un groupe de trois gamins. De petite taille qui plus est. Lynn ne leur donnait pas plus de dix ans. On pouvait entendre parler l’un d’entre eux.

- Vite vite vite ! On récupère les pierres et les bâtons qui servent au barrage ! Notre cabane est bientôt finie !

Lynn ne savait pas si elle devait être rassurée ou déçue. Elle s’attendait à voir des adultes qui en voulaient à la population. Comme il était très probable de le penser. Pas à des marmots qui se contentaient de jouer avec les constructions des adultes.

Soupirant, la rousse commença à se déplacer discrètement vers le groupe d’enfants.

- Aidez-moi à les attraper s’il vous plaît qu’on en finisse, vous aurez votre paiement après que je les aie sermonnés.

C’est envoyant ça que la jeune femme se disait que visiblement, les problèmes pouvaient venir de partout. Descendant la petite hauteur. Elle se dirigea vers le premier garçon. Qui était occupé a chercher des rochers et autres choses potables à récupérer sur le barrage. D’un coup, la jeune femme l’attrapa et le porta dans ses bras.

- C’est à vous Mercenaire ! Je compte sur vous !

Quand les enfants se retournèrent, leur visage se crispa en voyant la femme. Ils firent vite marche arrière et commencèrent à courir dans tous les sens.

- C’est Lynn ! La reine des sorcières ! Courez avant qu’elle vous punisse !

Lynn avait l’habitude de s’occuper d’enfants, surtout en ces périodes de troubles. Ce ne serait pas la première fois qu’elle donne une bonne correction à des enfants turbulents. Même si au fond d’elle, elle adore les enfants qui lui rappellent ses petits cousins qui n’ont pas eu la chance de grandir.

Un souverain juste, plaçant le mérite avant la naissance, capable de se placer à la plus petite des places et tenir son rôle de plus grand sans perdre de vue le rôle qu'il incarne. Tant de choses à attendre d'une seule personne, et tant de choses que l'ensemble des souverains connus ont perdu de vue. Au final, les rois et reines ne sont pour la plupart que des produits nés dans un seul but et n'ayant jamais conscience de ce qu'ils peuvent réellement accomplir. Galdion avait été un rêve, court mais splendide de ce qu'un souverain peut devenir et bâtir, mais très vite le rêve était devenu cauchemar alors qu'il s'enfonçait dans la corruption et la violence.

Et là, devant Aerdris, se tenait une femme, reine et guerrière, compétente et intelligente, qui sait qu'elle peut être petite aussi bien que grande et capable de tenir n'importe quel rôle pour le bien de son peuple. La surprise, serait le moindre des mots qui définirait l'état d'esprit du serpent blanc, bien trop habitué à la dégénérescence d'une noblesse bouffie par ses privilèges et son pouvoir. Cette femme, la dénommée Lynn Nèss Deidre, était une véritable curiosité mais aussi une admirable personne. Toutefois, il restait encore cette froideur typique des femmes de haute naissance, et cette droiture exagérée par un rôle que l'on pense être celui de la pure justice. Deux choses qui empêchaient Aerdris de tomber totalement sous le charme de la véritable reine qui se tenait devant lui.

"Nul sieur à me donner. Je suis né dans la fange et y mourrait sans doutes possibles, et je tiens autant à ce fait, qu'à mon nom." Et chaque mot était sincère, le serpent blanc portait sa basse extraction comme une fierté, lui ne devait son destin à nul autre que lui même, par ses actes et son mérite. "Toutefois, je reconnais dans vos propos une force bien supérieure encore à votre naissance et je conçois alors aisément pourquoi ces terres se remettent à vous pour leurs devenirs."

Mais, le mercenaire n'eut pas le temps de développer plus avant que la reine le coupa net pour le rappeler à sa mission. Toutefois c'était moins par envie de couper court à toute discussion que pour vérifier une arrivée soudaine de quelques individus manquant singulièrement de discrétion.

Et la raison à cela fut rapidement élucidée lorsque trois mômes apparurent et commencèrent à discuter sans faire attention le moins du monde si quelqu'un pouvait se trouver là. Et rapidement, les trois gosses dévoilèrent sans pudeur la raison de leurs forfaits, la raison la plus simple et enfantine possible, ici nuls méfaits ou volonté de nuire à la reconstruction d'une nation mais simplement la construction d'une cabane.

Légèrement déçu de ne pas avoir à user de sa lame, ni de pouvoir jauger des capacités de combat de la reine, Aerdris s'adossa contre le mur de temps de voir si son aide était toujours désiré. Le mercenaire avait même perdu l'envie de faire payer la mission, un simple repas gratuit devait suffire au final. Mais Lynn Nèss Deidre en décida autrement et bondit vers les enfants sans prévenir non sans avoir demandé l'aide du serpent blanc.

Finalement, alors qu'il courrait après un enfant hurlant de peur, Aerdris prit tout cela comme un amusement et non une mission. Cela faisait plusieurs mois qu'il n'avait eu d'autres missions que tuer, et n'avait que peu eu de contactes avec autre chose que des bandits, loups ou autres danger pullulant sur les routes du continent.

Rapide, c'était même sa première qualité, le serpent blanc rattrapa sans mal l'enfant, un grand gaillard d'une dizaine d'année qui éclata en sanglot dès que le mercenaire l'attrapa. Déjà bien bâti pour son âge le garnement était bien trop lourd pour être porté longtemps, aussi le mercenaire ne s'embêta pas et se contenta de faire marcher le gosse devant lui.

"Tu pleures sacrément vite pour un grand gaillard." Puis en le stoppant et s'agenouillant devant lui. "Il va falloir que tu sois sacrément plus courageux devant la reine, si tu veux découvrir le secret." L'enfant, qui avait cessé de pleurer, et qui commençait à reprendre ses petits airs de chef, jeta un regard interloqué au mercenaire. "Tu n'as jamais entendu parler du secret de ce barrage ?"

Le gosse secoua la tête et laissa sa bouche s'entrouvrir, sans la refermer, comme s'il était totalement hypnotisé par l'idée de découvrir quelque chose d'important.

"En vérité, la reine a jeté un sort sur ce barrage. En effet, l'eau qui passe est une source magique."

Aussitôt, l'enfant regarda le barrage et l'eau qui s'accumulait sur place. L'esprit fertile des enfants fit son œuvre à merveille que déjà il vit un miroitement inconnu et magique provenir de la source.

"Et, et quelle magie ?"

L'enfant était totalement absorbé par cette histoire, qu'il en oubliait complètement leurs bêtises et qu'ils pouvaient être punis. Se tenant face à l'enfant, Aerdris garda le silence et garda un visage stricte alors que le regard brillant du gosse l'amusait au plus haut point. Puis alors que le garçon menaçait de sauter sur place d'excitation, le mercenaire reprit la parole.

"Tu me sembles finalement bien plus courageux que tu me le laissais voir. Très bien je vais te dire le secret, mais tu dois me promettre que tu ne dirais rien à personne, ok ?" Évidemment l'enfant acquiesça immédiatement tout en réfléchissant à la manière dont il raconterait l'histoire aux deux autres. "La source est celle des héros, on dit que quiconque boit l'eau provenant du barrage devient lui même un grand héros qui vaincra le plus terrible des dangers. Mais pour cela il faut que le barrage soit construit et que la reine puisse lancer à nouveau sa bénédiction."

Dès qu'il sut le grand secret, l'enfant trépigna et jeta de nombreux regards vers ses deux compères qui semblaient écouter bien sagement la reine.

"Alors si je bois l'eau du barrage, je serais un grand guerrier ? Et toi, tu as bu l'eau c'est pour ça que tu cours aussi vite ?"

Aerdris ne put se contenir plus avant et laissa éclater le rire qu'il contenait tout ce temps, ainsi qu'un large sourire.

"Ah non, les héros sont bien plus impressionnants que moi petit. Je suis sûr que courras bien plus vite que moi lorsque tu seras grand, et tu deviendras peut être même un grand héros. Toutefois pour ça il faut que tu me promettes de plus jamais abîmer le barrage."

Le garçon n'eut même pas besoin de parler, sa manière de réagir fut amplement suffisante alors qu'il bondissait sur lui même et se rua vers ses camarades, oubliant complètement qu'il se trouvait devant sa reine. Maintenant le serpent blanc se concentra sur les actions de la reine, il était très curieux d'observer sa manière d'être auprès des enfants, une chose qui en dit souvent beaucoup sur un individu. Aerdris imaginait déjà la reine faire la morale aux enfants d'une manière froide et dirigiste, ce qui le fit sourire encore plus.

Une fois que Lynn attrapa l’un des garçons, l’autre voulut s’enfuir aussi, mais Aedris s’interposa et attrapa un autre de ses camarades, le laissant au milieu seul et coincé, sans vraiment d’échappatoire. Il n’eut pas d’autre choix que de se résigner. Regardant la jeune femme les larmes aux yeux, il bégaya à la magicienne, à deux doigts de tomber en sanglots.

- Pitié, le dis pas à nos parents qu’on Mademoiselle Lynn ! S’il te plaît !

Lynn resta neutre face au regard des garçons. Elle ne voulait pas que ce genre d’incident se reproduise mais elle ne voulait pas les punir non plus. Ils avaient vécus de terribles évènements, certains d’entre eux avaient même peut-être perdu un proche. Un peu fatiguée, la jeune femme n’avait pas envie de ramener ces enfants chez eux en les traînant par le pantalon, comme elle avait pu déjà le faire. Elle posa donc le garçon qu’elle avait dans les bras, malgré sa petite taille et sa légèreté, Lynn n’allait pas tenir très longtemps dans cette position gênante. Les pieds dans l’eau, Lynn se baissa pour se mettre au niveau des enfants. Voyant le mercenaire expliquer des choses au gamin qu’il avait attrapé, c’était à son tour de se montrer pédagogue.

- Ecoutez, vous savez ce que l’on mange souvent par ici ?
- Euuh des poissons ?
- Bien, maintenant vous savez tous les deux d’où viennent les poissons ?
- Moi je sais ! Je sais ! De l’eau ! Ils vivent dans la mer !
- Oui en effet. Vous ne pouvez pas les voir mais des poissons sont présents partout autour de nous, ils sont juste partis un peu plus loin car on leur fait peur. Mais si on enlève les pierres, les cordes et les bois qui servent à retenir les poissons, on ne pourra plus manger. Vous ne voudriez pas ça n’est-ce pas ?

Les enfants ouvrirent leurs yeux en grand, comme si ils venaient de réaliser quelque chose. Ils firent la moue l’instant d’après.

- Bah non, je ne veux pas avoir faim moi…
- Voilà pourquoi il ne faut pas toucher au barrage, compris ?
- Oui Mademoiselle Lynn.

Leur discussion fut vite interrompue quand le troisième garçon arriva auprès des deux autres. Pressé de raconter ce que le mercenaire avait pu lui dire. Lynn était intriguée par ce qu’il pouvait dire.

- Les gars ! Les gars ! L’eau elle est magique ! En la buvant vous pouvez devenir fort ! Mais il faut que Lynn puisse la bénir avant !

Le visage de la jeune femme se crispa légèrement. D’où venait donc l’idée du mercenaire ? Comment avait-il pu sortir des balivernes pareilles ? On n’était pas couchés si ces gamins se donnaient l’idée de boire l’eau de ce lac relié à la mer ainsi. Elle se retenait de rire, enfant, elle aurait cru directement à ce genre de choses.

- C’est vrai Lynn ! Tu vas bénir l’eau pour que la magie fasse effet ?

Lynn ne savait pas trop quoi faire, elle ne pouvait pas laisser les enfants repartir avec cette idée en tête, c’était comme croire aux licornes où aux dragons…quoi que, ces derniers ont existé. Il fallait trouver quelque chose qui puisse les empêcher d’aller en boire. Une idée simple vint à l’esprit de la jeune femme.
Sans répondre aux enfants, Lynn se mit à leur sourire. Elle pointa alors du doigt le ciel, toujours accroupie, pour fabriquer une petite sphère lumineuse. Elle jeta ensuite cette dernière vers le centre du lac, ce qui provoqua de magnifiques ondulations qui se dispersèrent. La femme avait décidé de rentrer dans le jeu que le mercenaire avait lancé, histoire de les concentrer sur autre chose.

- Et voilà, l’eau est en train d’être bénite. Mais il faut attendre au moins 10 ans avant de pouvoir la boire ! Ce qui vous laisse le temps de grandir par vous-mêmes ! Rien ne nous empêche de manger les poissons cependant, vu qu’ils absorbent un peu de bénédiction, ils seront encore meilleurs !
- Ouaaah, t’es trop forte Lynn !
- Allez rentrez chez vous, sinon vos proches vont s’inquiéter pour vous. Promis demain je joue avec vous. Je vous amènerai même un magicien qui peut faire des prouesses avec la terre et ainsi mieux construire votre cabane !
- C’est vrai ? Merci Lynn ! A demain !

Et les enfants partirent, le sourire grand aux lèvres. Rentrant chez eux. Lynn s’approcha alors d’Aedris, puis lui donna une bourse, tout en émettant un sourire sincère et chaleureux.

- Merci pour votre aide Monsieur Daedran. Voilà pour vous. Votre paiement comme convenu. Je suis encore désolée pour ces enfants. Je ferai plus attention avec eux à l’avenir. Je risque de faire appel à vous un de ces jours à nouveau.

Puis, marquant une pause, la future souveraine s’apprêta à repartir, d’autres affaires et travaux l’attendaient. Il y avait encore tant à faire...

- Je vous laisse ici, profitez bien de votre séjour à Dissiri. N’hésitez pas à passer me voir si jamais votre voyage vous amène par ici. A la prochaine !

Lynn Nèss Deidre partit alors. Une nouvelle mission accomplie. Ce mercenaire émanait quelque chose d’étrange, mais elle pourrait en savoir plus sur lui la prochaine fois qu’ils se rencontreraient. Elle était certaine cependant qu’elle allait entendre parler de lui à nouveau un jour ou l’autre.

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Il y a-t-il une chose moins surprenante que la spontanéité d'un enfant ? Cette rare honnêteté trop souvent disparue chez l'adulte, et trop souvent ignoré par la vieillesse. Toutefois aussi peu étonnante qu'elle fut, elle réussit toujours à créer, chez ceux capable de la percevoir comme il se doit, une forme différente de surprise, celle de la redécouverte d'un monde perdu lors du passage à l'âge adulte.

Et encore cette fois, les enfants ne le surprirent guère, Lynn nettement plus en revanche. La reine se révéla moins froide et stricte que se l'était imaginé Aerdris. Même si elle ne témoigna pas du même attrait pour la légende du mercenaire, elle s'amusa tout de même en la perpétuant de manière nettement plus crédible, et terre à terre certes mais ne l'ignora pas.

Toutefois, ce qui plut le plus au serpent blanc, ce ne fut pas le sourire, fort agréable de la jeune femme, mais l'aisance qu'elle avait avec des gens de basse extraction et la manière qu'ils avaient de l'appeler Lynn, tout simplement. Cette simple manière d'être était en soi la plus belle des qualité aux yeux du mercenaire.

Le reste, se déroula de la plus habituelle des manières, le contrat fut scellé, et modifié à la surprise de la reine à n'en point douter.

"Cette mission, si je peux l'appeler ainsi, était au final un moyen plaisant de passer la soirée." Aerdris souriait tout en regardant les enfants partir au loin. "Et j'ai cette fois-ci je vais demander une faveur. gardez cette argent et investissez le pour l'avenir de ces enfants. Ne considérez pas cela comme un refus de paiement mais comme un investissement à long terme."

Heureusement la reine accepta sans trop rechigner, sûrement pressée par d'autres affaires plus urgentes pour perdre d'avantage de temps sur quelque chose d'aussi futile.

"C'était un plaisir, il est évident que je ne passerais jamais par ces terres sans vérifier si la couronne a du travail pour moi. Toutefois ce sera pour un futur inconnu, je m'en vais retourner dans le bourbier pour d'autres affaires." Et pour la deuxième fois, Aerdris effectua une courbette sans arrières pensées, ni mépris.

"Que vos affaires vous soient bonnes, reine."

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» [Quête 5] Aerdris et Lynn
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