Solitude [PV Harmonie]

Son aventure commençait maintenant. Longtemps fut-il livré à lui-même, passant d’un groupe de survivant à un autre, mais sa présence au sein de ces-derniers se révélait être une catastrophe sans nom. Aucun n’accepta la personne qu’il était. Un personnage arrogant qui méprisait la vie d’autrui. La pitié n’était pas une chose qu’il connaissait depuis quelques temps. Il survivait comme il pouvait. Il chassait, se logeait sous des petits abris de fortune. Aucun doute là-dessus, il était certes un homme méchant, mais il était surtout un homme débrouillard. Depuis qu’il était seul, depuis qu’il était son propre chef, tout allait beaucoup mieux. Toutefois, plus les jours passaient, plus la solitude était pesante. Et plus la solitude était pesante, plus il ressentait le besoin – non pas d’être aux côtés d’une quelconque personne, mais de se confronter à quelqu’un d’autre dans le but de défouler sa haine du peuple.

C’est dénué de toutes émotions qu’il vagabondait de zone en zone, dans l’espoir de trouver quelqu’un… De trouver quelqu’un à qui il pourrait faire payer toutes ces années de solitude. Toutes ces années de marche, à la quête d’un on ne sait quoi. C’est d’ailleurs un regard vide, un visage froid qu’arborait John tandis qu’il marchait dans une forêt glacial. Est-ce que la température négative le gênée ? Non. Il était perdu dans ses pensées. Le froid n’avait plus aucune conséquence sur son organisme malgré le fait qu’il soit que très peu vêtu. En s’adossant à un arbre, il repensait à la chaleur qu’avait dégagée sa main tandis que la gorge du chef des survivants fondait dans sa paume… Oh ? Un frisson… Le froid ? Non. L’excitation. Son existence n’avait aucun réel but si ce n’est la désolation et le chaos. Et aucun doute que malgré la solitude, il aimait relativement la situation actuelle… Le Grand Cataclysme… Voilà une bénédiction !

Tout en s’adossant à un tronc d’arbre, laissant quelques flocons de neige tomber de la branche se trouvant au sommet, John aperçu un petit animal. Un écureuil ? Cela en avait l’air. Il se mit accroupie et tendait sa main pour amadouer ce dernier. La tentative semblait marcher. La petite bête s’approcha du mage tandis qu’il commença à sentir ses doigts. Il ne fallut qu’un instant pour que John crée une légère flamme laissant l’écureuil prendre feu. Il se débattait. Il se roulait par terre, mais n’arrivait pas à venir à bout de la chaleur excessive qui le consumait. Il était… CONDAMNE !

Le mage de feu se releva et observait la situation avec un plaisir non dissimulé tandis qu’il s’adossa à nouveau à ce fameux tronc d’arbre. La température continuait de dégringoler au fur et à mesure que le temps passait… Mais le temps était-il réellement important pour John ? Vous connaissez évidemment la réponse…

Harmonie ruminait à l’intérieur. Ce dragon lui avait pris bien plus qu’elle ne le pensait aux premiers abords. Elle avait été d’abord fière d’avoir réussi à protéger tous ceux qu’elle aimait, mais son voyage avait révélé qu’en dehors de ce village qu’elle avait préservé, la grande majorité d’Ashenwall n’était que ruines et désolation. Mais le pire de tout, est que le souffle du dragon avait été d’une incroyable puissance, bien loin des souffles des mages de feu qu’elle avait eu l’habitude de croiser. Sa volonté avait réussi à prendre le dessus sur la destruction, mais à quel prix. Elle-même ne comprenait pas : le pouvoir des mages est la chose la plus complexe qui soit. Il s’adapte à l’esprit, à la volonté, à la puissance, mais jamais de la même façon et jamais régulièrement. Les pouvoirs d’Harmonie s’étaient envolés avec le dragon, ne lui laissant qu’un contrôle de la glace éphémère et parfois incontrôlable.

Elle essayait tant bien que mal de récupérer un semblant de contrôle sur son propre pouvoir. Elle se trouvait au milieu d’une plaine enneigée, au cœur de la forêt gelée. Elle enleva sa cape bleue nuit, la morsure du froid lui caressant ses bras nus. Elle prit son bâton dans sa main droite, les cristaux bleus s’illuminant faiblement. Elle le fixa un moment, espérant qu’il répondrait à sa demande, aujourd’hui. Elle prit une grande inspiration, face au vent glacial qui lui frappait le visage et faisait voler ses cheveux en arrière. Elle tendit son bâton, et commença son entraînement… Ou plutôt sa reconquête. Elle commença très légèrement, constituant des bonhommes de neige. Aucun problème. Puis elle accéléra le processus, faisant tout d’abord neiger, puis envoyant des piques de glace dans les bonhommes fraîchement créés. Elle fit ensuite jaillir des piques de glace du sol. Encouragée par ces premiers succès, elle tenta d’accélérer le mouvement, essayant de se battre comme elle le faisait avant, au cœur d’un blizzard, les glaces virevoltant autour d’elle lui servant d’armes éphémères, enchaînant les techniques qui disparaissaient dès qu’ils étaient utilisés.

Cette fois, ce fut un échec cuisant. Elle parvint à lever un blizzard, mais les éléments lui échappèrent. Elle ne fut capable de rien contrôler, au contraire. LE vent plus que glacial déchirait les branches et les arbres, les nuages de neiges se levaient, la glace étant présente massivement au cœur de cette tempête, qui commençait à avancer dangereusement dans une autre direction. Elle pouvait toujours sentir la puissance glacière, et elle était catégorique : si cette tempête qu’elle avait créée s’abattait sur un village, il était fini. Et le blizzard ne s’arrêterait que s’il pouvait s’évanouir au-delà de la forêt ou si elle parvenait à le maîtriser… Mais qui sait ce qu’il pourrait rencontrer avant de sortir ?

Elle empoigna rapidement sa cape et se mit à courir vers le même endroit que la tempête. Il fallait au moins qu’elle prévienne ceux qui seront sur le passage du blizzard, même si elle essaierait de l’arrêter une nouvelle fois. Mieux vaut prévenir que guérir, après tout. Le craquement des branches et des arbres était derrière elle désormais, et elle ne cessait de courir, encore et encore, plusieurs minutes qui lui semblèrent plusieurs heures. Elle n’entendait plus le cœur de la tempête, mais elle sentait au froid environnant qu’elle ne tarderait pas à frapper. Fort heureusement, personne n’était présent sur la route qu’elle avait empruntée. Aucune village, aucun voyageur.

La première personne qu’elle rencontra était un homme adossé à un arbre et qui se délectait apparemment d’un animal qu’il venait de chasser. Essoufflée, elle stoppa sa course un peu à l’écart, ne sachant pas si l’homme l’avait remarquée ou non. Elle se rapprocha de lui, remettant ses cheveux à peu près convenablement avant de lui adresser la parole.

- Bonjour. Désolée de vous interrompre dans votre repas, mais je pense que vous devriez partir. Il y a une terrible tempête qui arrive dans cette direction.

Elle évita de dire que ce n’était qu’un cœur de tempête, une espèce de tornade, qu’elle avait créé elle-même et qui serait donc forcément plus puissant puisque créé par magie…

John continuait de grignoter son écureuil. Il rongeait les os du restant de viande. C’était suffisant. Alors qu’il n’avait toujours pas finit, une jeune demoiselle vint à sa rencontre dans le but de le prévenir qu’une tempête arrivait. Rien ne faisait peur à John. Il était insouciant, et s’il avait tort il assumerait les conséquences de ses actes. Jetant la carcasse de l’animal derrière lui, il jetait un coup d’œil à l’horizon. Le ciel était gris, sombre. Une atmosphère que le mage de feu adorait. Toutefois, la basse température qui commençait à régner en ces lieux le rendait mal à l’aise. Il n’aimait pas le froid. Il n’aimait pas la neige. Il n’aimait pas la glace. Il était si bien dans une ambiance chaude et chaotique.

« Ce n’est rien. Pour la tempête, peu importe. »

Il montrait une indifférence sans égale face à l’information que la fille venait de lui dévoiler. Ce qui l’intéressait plus, était la raison pour laquelle elle était présente, aussi proche de la tempête. Etait-elle ce que l’on appelait « une chasseuse de tornade » ? Une simple inconsciente ? Elle semblait si fragile, si innocente que son existence même paraissait impossible. C’est pour cela qu’il l’interrogea d’une façon digne d’un mage de feu.

« Qu’est-ce que tu fais là ? »

Toujours adossé à son tronc d’arbre, il guettait l’arrivée imminente de la tempête. Le froid gagnait en intensité, si bien qu’il fut obligé de faire un feu de camp. Des brindilles présentes au sol suffisaient pour allumer ce-dernier. Se mettant accroupi proche des morceaux de bois, il mit la main au centre et claqua des doigts provoquant une étincelle. Le feu prit aisément, mais cela ne faisait aucun doute qu’un vent violent suffirait pour éteindre la source de chaleur. Mais c’était un début. Un début aussi pour le vent qui commençait à s’élever faisant danser les flammes.

« Je m’interroge réellement sur les raisons qui t’ont amené si près de la tempête… Et… Je te trouve trop innocente pour… Être innocente. Cela cache forcément quelque chose. » Son regard se posa sur celui de son interlocutrice. « Qu’as-tu à me dire que je ne sais pas ? »

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